Note de lecture[1] : Comment Woody Allen peut changer votre vie de Eric Vartzbed
Eric Vartzbed, psychothérapeute d’orientation analytique, consacre un livre sur les vertus thérapeutiques des films de Woody Allen. Avec beaucoup d’acuité clinique, il dresse une cartographie du héros allénien, qu’il met à l’épreuve de la psychanalyse.
L’auteur explique que lorsqu’il voit pour la première fois le film dramatique de Woody Allen, Une autre femme, “ il en éprouve un choc, un saisissement ”[2]. La rencontre avec ce film fonctionne pour lui comme un Hapax cinématographique, une expérience déterminante, un point de départ “ qui appelait un travail de compréhension”[3] sur quelque chose qui le concernait à son insu. “Au sortir du film, passé ce choc, une intense activité psychique s’ensuivit“.”[4] Comme l’héroïne d’Une autre femme, je fus submergé par un torrent de souvenirs, une cascade de réminiscences”[5].
Il reprend à son compte un vers de Rilke, cité dans le film “ Il n’existe point là d’endroit qui ne te voie. Il faut changer ta vie”[6]. Comment dès lors transformer l’impasse en issue se demande l’auteur.
Nous savons que Woody Allen est resté longtemps en analyse ( 36 ans, selon Marion Meade) et on retrouve souvent dans ses films des références à la psychanalyse. Si les films de Woody Allen trouvent un large écho dans le public, c’est sans doute parce que nous nous retrouvons dans son personnage d’anti-héros. De film en film, Woody Allen dessine un personnage angoissé, névrosé, hypocondriaque grincheux, complexé, bégayant, veule, hypocrite, touchant et maladroit en amour qui aspire à autre chose; face à un monde qu’il juge hostile et incompréhensible. Parfois découragé, il sombre dans la dépression, tente de se soigner par la psychanalyse.
Le comique d’Allen est un comique très intellectuel et c’est comme s’il mettait en mot et en image ses propres maux en utilisant le cynisme, l’ironie, l’humour, le décalage : “ Je hais la réalité, mais c’est quand même le seul endroit où l’on peut s’offrir un bon steack”. Ses aphorismes jubilatoires ne manquent pas de nous faire sourire face à un acharnement à vivre. Il dérange parce qu’il interroge, tel un enfant bavard, casse-pieds, les questions existentielles sur Dieu, le sens de la vie, la mort et bien sûr l’amour.